Les images recueillies révèlent à la fois :
o La très forte capacité d’immersion des enfants devant l’écran, par tout un ensemble de facteurs. Les écrans peuvent être classés selon leur degré potentiel d’immersion, de l’ordinateur à la console. Tout se passe comme si l’enfant n’avait qu’un seul mode d’écoute (immersif), contrairement aux adultes qui en ont plusieurs.
o La très faible adaptation relative des écrans (et des meubles) aux enfants. Ceux ci doivent se glisser très tôt dans une architecture écranique qui n’est pas conçue pour eux.
o L’impact de l’écran en soi, indépendamment des images qu’il diffuse. Cette métamorphose dans l’accès au jeu ou au savoir exige un renouvellement en profondeur, pas seulement des adultes mais de l’école et de la société.
I/ Un pouvoir d’immersion inédit
Trois types de posture
Les photos et commentaires recueillis montrent trois grands types de postures, qui peuvent déterminer un certain rapport à l’écran :
o Le DORMEUR. Une posture couchée, corps détendu, comme en état de sommeil. C’est le mode « cinématographique » de rapport à l’écran (plongé dans le noir, coupure du monde, assis / couché), comme si le spectateur voyait sur l’écran les images de son rêve.
Comme dans le cas du somnambulisme, où les inhibiteurs synaptiques sont désactivés, il peut arriver que l’enfant bouge, imite ce qu’il voit sur l’écran.aaa
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o Le GUETTEUR. Une assise verticale, où l’enfant se tient droit, en situation de veilleur ou de prédateur guettant sa proie. Cette posture est une posture de contrôle, d’activité, devant l’ordinateur ou la console.aa
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o LE COCON. La troisième posture est déterminée par l’écran de console portable. Nous avons ici affaire à un petit objet tout à fait approprié, domestiqué. La posture est celle de l’enfant replié sur lui-même, emmitouflé dans un monde clos, en position « fœtale », comme un chat jouant avec une souris.aaaa
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Type d’écran |
Type de posture |
TV |
Couchée / dormeur |
Console / ordinateur |
Droite / guetteur |
Console Portable |
Recroquevillée / cocon |
Une écoute essentiellement immersive
Le premier enseignement transversal des photos recueillies réside dans le très haut niveau d’absorption des enfants devant les écrans, qu’il s’agisse de la TV, de la console, ou de l’ordinateur. Ces écrans, qu’ils soient dits « passifs » ou « interactifs » se ressemblent davantage qu’ils ne se différencient.
Les témoignages sont unanimes : les enfants paraissent « happés », « fascinés », et les parents soulignent la façon dont les enfants sont capables de faire abstraction de tout ce qui peut se passer autour d’eux.
- Regard très concentré, ne se préoccupe pas de ce qui se passe autour de lui
- Figé devant son ordinateur énervé devant son jeu en ligne prière de ne pas le déranger
- Il est vraiment dedans, il est totalement dans un autre monde
- La maison peut s’écrouler sans que ça ne la dérange. Autant parler au mur
- Ce qui me préoccupe le plus, c’est la facilité qu’a ma fille à se couper du monde qui l’entoure
- il est complètement absorbé
Cette absorption des enfants étonne d’autant plus qu’elle tranche à la fois :
o Avec d’autres postures jugées plus « normales », et en particulier la figure du lecteur sagement assis. En effet, le rapport à l’écran englobe une plus grande diversité de posture:
o Soit une concentration et une attention beaucoup plus forte (à tel point qu’elle en devient suspecte)
o Soit des gesticulations, des cris, et de l’excitation qui tranchent avec le calme requis des lectures studieuses « d’autrefois ».
o Avec l’attitude double des parents face aux écrans. Les adultes peuvent être dans l’absorbement total (comme au cinéma, voire à la télé), mais ils manifestent également des modes d’écoute plus intermittentes, distraites, distanciées.
Les raisons de l’immersion
Cette immersion dans l’écran tient à plusieurs choses.
Il y a d’abord des facteurs externes à l’écran.
o Le type d’images visionnées : les enfants regardent essentiellement des récits de fiction, font des recherches sur leurs personnages favoris, jouent… ce sont autant d’activités qui favorisent un engagement très important, contrairement aux programmes « adultes », qui impliquent des postures assez différenciées.
Toutefois le type de programme visionné n’est pas seul en cause dans l’immersion de l’enfant. L’absorbement tient autant au dispositif qu’aux images elles-mêmes. Les adultes ne disent pas toujours qu’ils vont voir tel ou tel film, mais plutôt qu’il « vont au cinéma », ou « se faire une toile ». Ces expressions montrent que le plaisir de se plonger dans le noir, pour jouir de la fascination devant la « lumière qui bouge » (Céline, Voyage au bout de la nuit) a au moins autant d’importance que l film visionné .
o L’effet « loupe » de l’écran : on additionne aujourd’hui sous l’étiquette de « temps passé devant l’écran » des activités autrefois dispersés et statistiquement moins visibles.
Il ne venait pas à l’idée d’additionner le temps passé à des activités de jeu aussi diverses que les jeux de société, de construction, de cache-cache, etc. Aujourd’hui que de nombreuses activités (jeu d’échec sur le téléphone, bowling avec la Wii, etc) peuvent passer par l’écran, il devient possible de les amalgamer, de les comparer au temps passé à l’école, elles deviennent socialement visibles.
o La Répétitivité. La répétitivité a toujours été une demande naturelle de l’enfant. C’est à sa demande que les adultes sont souvent obligés de raconter pour la dixième fois le même conte, de refaire le même jeu, de repasser le même film (c’est « l’effet toboggan »). L’écran encourage cette demande car le potentiel de captation (« ne zappez pas », effets de réalisme 3D, enchaînement des dessins animés) paraît plus important. Ce qui nécessite un contrôle du temps passé, avec une limite d’heure à ne pas dépasser.
Plusieurs éléments témoignent et renforcent cette absorption de l’enfant :
o Bien en face. Les enfants semblent chercher à se mettre bien en face des écrans quels qu’ils soient (TV, console, ordinateur), exactement dans l’axe, quitte à ce que ce soit parfois en dépit de l’organisation du salon.aa
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o Échelle et distance. Les enfants se rapprochent aussi de l’écran de télévision, en s’asseyant sur une table ou sur le bord du canapé, et parfois même en s’asseyant par terre, pour regarder l’écran en contre-plongée, comme s’ils voulaient retrouver le degré d’immersion que les adultes ont au cinéma .
Cette posture semi couchée, en contre-plongée par rapport à l’écran participe à l’immersion de l’enfant.aaaaaaa
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o Pénombre. Les problèmes de reflets sur l’écran peuvent inviter à fermer les fenêtres ou les volets, pour construire la pénombre (très utile dans le cas des jeux, pour ne rien perdre de ce qui apparaît sur l’écran). La posture est celle d’un effacement du monde alentour pour une meilleure plongée dans l’écran.aa
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o Implication physiologique du spectateur . Au-delà des aspects d’échelle et de proximité, l’écran invite aussi à une implication physiologique complète. Il est d’ailleurs assez fréquent que les enfants saisissent des objets (coussins, couvertures) lorsqu’ils visionnent l’écran, comme s’ils manifestaient le besoin de toucher, de manipuler des objets, signe de leur investissement tactile dans l’action.aa
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o Les effets de caméra, en particulier le travelling avant, la contre-plongée, ou la succession rapide des plans dans les programmes jeunesse construisent une implication du corps entier, invité à suivre les mouvements amorcés à l’écran. Dans le cas des jeux vidéos, où le joueur est placé « par dessus l’épaule » de son avatar, l’implication et l’identification sont encore plus fortes.
o Les effets sonores et les superpositions de bande son (voix-off, musique de fond, dialogue, instructions…) obligent à se concentrer, à « tendre l’oreille », ce qui favorise encore l’implication sensorielle du jeune public, et son agacement face aux bruits environnants parasites.
o Les effets visuels, et les apparitions progressives de contenus à l’écran (indication de jeu, apparitions provisoires ou furtives) obligent également à une concentration du joueur ou du spectateur.
L’usage de l’écran remet en cause la spécialisation sensorielle des médias : contrairement à la lecture, le rapport à l’écran apparaît non pas comme une activité surtout visuelle, mais comme une expérience complète, visuelle, auditive et tactile. Le rapport à l’écran invite à une immersion complète du corps entier, à la télévision et encore davantage dans le cas du jeu vidéo.
o L’implication physiologique des enfants face aux écrans, est encore sensible dans le cas des consoles, avec la possibilité de contrôler manuellement ce qui se passe à l’écran, et l’effacement toujours plus grand de la frontière entre le « voir » et le « toucher ».
o Le jeu vidéo sur console fixe (TV ou ordinateur) suppose une synchronisation particulière de l’œil et de la main. On les voit sur des photos en train de bouger. Les parents décrivent des enfants assis tout au bord du canapé, « prêts à bondir » en cas de besoin. aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Dans ces exemples les fonctions du « voir » et du « toucher » opèrent cependant dans des zones très différentes : on ne touche pas ce que l’on voit, il faut le détour par la manette, qui traduit à l’écran les indications données par les doigts.
o Avec les consoles portables, on grimpe d’un degré dans le niveau d’implication car la position recroquevillée des enfants, blottis « en boule », et le rapprochement de l’écran et de la manette font que tout se passe dans un espace très réduit, où l’enfant se constitue un « monde à part » encore plus retranché. a
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o L’évolution du design des consoles de jeu portable montre à quel point les fonctions du voir et du toucher, autrefois séparées, ont tendance à s’imbriquer. Dans la PSP, l’écran semble avoir « intégré » la manette de jeu.
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Cette évolution n’est du reste pas réservée aux enfants, elle est parallèle à celle de l’iphone avec son écran tactile, où l’on touche l’écran directement, sans l’intermédiaire d’un clavier. Ici ce n’est plus l’écran qui est descendu au milieu des touches comme dans la PSP, ce sont les touches qui sont « entrées dans » l’écran.
o Finalement, les écrans tactiles deviennent si perfectionnés que le statut d’écran disparaît : il s’efface en tant qu’écran, et devient un plateau de jeu, un panneau sur lequel l’enfant déplace des objets, et non pas une interface qui lui ferait voir des programmes.
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o Le rapprochement des fonctions de la vue et du toucher (et même du mouvement du corps entier) est encore plus manifeste dans le cas de la console Wii de Nintendo.
La particularité de la console Wii consiste à revenir au réel par le détour du virtuel. Elle est vécue comme une activité réelle assimilable dans certains cas à un sport (golf, tennis, bowling, boxe, etc).
La Wii est aussi un retour à l’analogique par le biais du numérique : pour déplacer un personnage à l’écran, il n’est plus nécessaire de presser un bouton, il faut bouger soi-même, de façon très intuitive et spontanée.
NB : la Wii est l’un des rares exemples constatés où la console de jeu rassemble les générations. Le plus souvent, la console de jeu les divise. Ici, les adultes peuvent s’initier aux jeux Wii, même s’ils ne semblent pas avoir eux-mêmes été d’anciens joueurs (les parents joueurs se recrutent davantage chez les jeunes adultes, et dans ce cas là, ils ont accès à des jeux évolués interdits à leurs enfants, ce qui recrée une ligne de partage des générations.
⇒ La Wii marque l’aboutissement d’une logique d’implication physiologique du spectateur, avec l’intégration de la vue, du toucher et du mouvement corporel
⇒ Les parents soulignent que ce type de dispositif est un facteur d’excitation très intense à l’intérieur du foyer, ce qui peut poser problème, car il n’y a pas le « sas de décompression » du grand air ou du vestiaire, et l’enfant semble avoir du mal à se calmer « sur commande » après le jeu.
De ce point de vue, l’apparition de la touch génération, intuitive, avec l’implication physique du joueur, est parallèle d’une évolution des TV destinées aux adultes (Téléviseur Phillips Ambilight / Auréa)
Dans ces types de produits, ce n’est plus le spectateur qui semble chercher à « entrer dans » l’écran, mais l’image « à l’intérieur » de l’écran qui en « sort », ou « enveloppe l’espace » du spectateur / joueur.
⇒ L’immersion dans l’écran est un premier phénomène transversal du rapport des enfants aux écrans. La diversité des écrans elle-même peut être ramenée à une diversité des types d’immersion.
⇒ Les écrans dits « passifs » ou « interactifs », « de récit » ou « d’action » ne se différencient qu’en ce qu’ils offrent différentes modalités et degrés d’immersion, plus ou moins forts, psychique ou psychosomatique.
La hiérarchie d’immersion des écrans
On peut s’orienter dans la diversité des écrans en fonction du niveau d’immersion qu’ils déterminent pour l’enfant.
Type d’écran / activités |
Niveau d’immersion |
TV d’accompagnement |
Plutôt faible, en mode « réveil » et accompagnement d’activité (fond sonore, arrière plan des activités de jeu) |
Ordinateur (surf Internet, travaux, dessins) |
Plutôt modéré (ouverture à l’environnement) |
TV d’écoute |
Fort, en mode « récit », « écoute d’une émission » (mais les perturbations sont très gênantes : elles sont perçues par le spectateur, qui se rapproche de l’écran pour les occulter, ce qui souligne qu’il y est sensible, au moins en partie) |
Console de jeu (sur TV et ordinateur) |
Très forte implication physiologique et haut niveau d’immersion dans une action de contrôle de l’image ou commande |
Appareils portatifs (TV sur portable, jeux vidéos portables) |
Très forte implication physiologique et haut niveau d’immersion : posture de repli, enfants recroquevillés, rassemblement des fonctions de voir, toucher dans un cocon très réduit |
Le sens de l’immersion
Il ne faut pas se méprendre sur le sens de cette immersion : elle ne signifie ni « solitude / autisme », ni « passivité ».
o Même très absorbés, les enfants ne sont pas seuls. On observe d’abord sur les images la présence de peluches, de figurines familières, voire de doudou (bien qu’il soit difficile d’attester la nature exacte de ces doudous). Peut-être ces figurines ont-elles pour fonction d’accompagner l’enfant dans sa découverte de l’écran, peut-être constituent-elles un référent familier.
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Les enfants sont parfois entourés de témoins. Ces témoins peuvent là aussi jouer plusieurs rôles, tous plausibles, sans qu’il soit possible de trancher définitivement à partir des photos.
1. Ce sont d’abord des témoins qui, à la manière des peluches et animaux familiers, jouent le rôle de référent, comme pour garantir la « séparation des mondes » et attester de ce qui relève de l’écran et ce qui relève du réel.
2. Ce sont aussi des conseillers, qui aident à comprendre ce qui se passe sur l’écran
• Dans le cas des jeux vidéos, ils peuvent donner des conseils, diriger le joueur, l’aider à résoudre des énigmes (voire jouer également)
• Dans le cas de la TV, l’enfant peut aussi être accompagné de ses parents avec qui il partage les images.
3. Les témoins sont un public, un auditoire à qui l’on demande de prendre acte d’une réussite, d’un succès. Ce peut être aussi l’envie d’initier un membre plus petit de la famille, et jouer le rôle de « grand », ou plus généralement de partager en famille.
o Même très absorbés, les enfants ne sont pas passifs. Ils témoignent à la fois d’une implication (concentration ou implication psychologique et motrice, qu’il s’agisse de résoudre des énigmes, de suivre une histoire) et d’un souci de contrôle.
La consultation de DVD montre que les enfants apprennent très tôt à contrôler l’image, repasser des scènes, aller directement au chapitre voulu, etc. Les futurs progrès des appareils périphériques à la TV (contrôle du direct, enregistrement numérique) devraient amplifier ce phénomène, et lisser en partie (seulement) la distinction entre les écrans dits « de récits » et « d’action » car l’écran TV est aussi un écran d’action et de contrôle, et l’écran de jeu intègre aussi des éléments de récit (quête d’un personnage, succession de niveaux)
Il n’y a pas, dans le matériel récolté, de quoi accréditer la thèse d’une « passivité » qui serait plus importante ou plus dangereuse dans le rapport à l’écran que dans le rapport à un autre support (ci-dessous : La jeune Maîtresse d’école, Chardin)
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⇒ On voit qu’il y a plusieurs modes d’immersion : immersion dans le récit, immersion dans l’action, immersion à plusieurs, immersion active.
⇒ En revanche, ce qui est plus étonnant, c’est qu’il ne semble pas y avoir d’autre rapport à l’écran que le rapport immersif. C’est toujours cette posture qui domine, dans les images et les témoignages.aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
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L’enjeu pour l’enfant : développer d’autres rapports à l’écran ?
Le rapport des enfants aux écrans semble très spécialisé, comme s’ils n’étaient capables que d’une seule modalité d’écoute.
Qu’il s’agisse d’écran « du récit » ou d’écran « de l’action », ce qui est dominant, c’est la « cinématographisation » des écrans , c’est-à-dire la domination de la posture d’immersion sur les autres postures possibles (consultation, interaction, multi-tasking, qui apparaissent peut-être plus tard).
Cette « mono-posture » tranche avec la diversité des postures adoptées par les adultes :
o D’une part des postures d’immersion totale, par exemple devant l’écran de cinéma, qui est celle d’une absorption complète par l’histoire, une plongée dans le noir, le silence, etc. L’esprit se laisse entièrement guider par ce qu’il voit.
o D’autre part des postures dite « d’actualisation » ou de commentaires à haute voix face à l’écran, où l’on va rapporter ce qui se passe sur l’écran à la vie réelle ou à des situations de son immédiat : le temps qu’il fait, la vie de quartier, la politique locale, (support de discussion, réaction aux personnalités, interpellation pour venir voir quelque chose, etc).
o Des postures de contrôle et de manipulation de données sur l’écran, qui ne sont pas pleinement immersives, mais qui fonctionnent sur le mode de l’interrelation, du zapping, de la mise en rapport d’éléments issus de différents logiciels.
o Des activités de jeu et de contrôle de l’image sur l’écran, aujourd’hui minoritaire mais qui peuvent se développer avec les nouvelles générations de parents. Certains jeunes adultes peuvent être d’anciens joueurs, ou partager la console, ce qui les rapproche de leur enfant, tout en restaurant une hiérarchie entre le jeu « pour l’enfant » et le jeu réservé à l’adulte, plus sophistiqué / violent.
L’enjeu consiste donc, pour l’enfant :
o Certes à tenter de « faire sortir » ou « d’empêcher » un état d’immersion, légitime en soi, lorsqu’il est excessif ou dangereux.
o Mais surtout à diversifier ses rapports à l’écran, en proposant d’autres types d’écoute, comme l’actualisation, le commentaire, la discussion avec l’adulte, la mise en rapport avec l’environnement. Cela peut se faire par la diffusion sur des chaînes pour enfants de davantage de programmes familiaux, regardables par tout le monde, ou par des programmes « adultes » qui favorisent l’actualisation avec le quotidien et l’interaction avec les parents.aa
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II/ Le degré d’adaptation des écrans
Des écrans peu ou pas adaptés
Une chose frappe parmi les écrans proposés aux enfants dans le cadre familial : ce ne sont pas des écrans adaptés à l’enfant.
Les écrans dédiés aux plus petits marquent souvent le souci de s’adapter à leur public, de répondre à ses exigences spécifiques :
o Rondeur et douceur (pas d’angle droit, pas de choc)
o Couleurs gaies et vives, primaires
o Robustesse
o Poignées et prise en main facile (rugosité, reliefs, largeur des touches, etc)
En revanche, tout se passe comme si entre 6 et 11 ans, l’enfant devait s’insérer (tant bien que mal) dans une géographie domestique qui n’a pas été conçue pour lui (en termes de distance, d’angle de vue), et utilise des écrans qui sont peu ou prou les mêmes que ceux des adultes.aa
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Les enfants ont donc aujourd’hui assez rapidement accès à un matériel polyvalent, utilisable par tous, que chacun peut consulter pour un usage adapté, visionner des programmes dédiés et ciblés, et dont les enfants acquièrent une maîtrise rapide, voire une expertise qui dépasse celle des adultes.
Cette « non-adaptation » peut avoir des conséquences plus ou moins dommageables, et entraîner éventuellement certains troubles dont on accuse justement les écrans (posture avachie, effets sur les yeux), alors que c’est plutôt le dispositif mis en place pour les regarder (meuble, distance) qui semble en cause :
o L’enfant doit se rapprocher de l’écran car la distance écran / canapé n’est pas adaptée à l’enfant, il faut se tenir sur le bord du canapé pour être bien en face (tandis que les adultes semblent tolérer voir l’écran de côté).aaa
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o Les enfants doivent se tenir bien droits car il faut se « hisser » sur la chaise pour bien voir l’écran, mais aussi lever le bras pour manier la souris, posée sur un plateau un peu trop haut pour l’enfant. Ce qui peut éventuellement à terme poser des problèmes d’articulation.aaaaa
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⇒ La non-adaptation des écrans aux enfants est une deuxième constante du rapport des enfants à l’écran. Cette non-adaptation peut-être responsable de certains troubles dont on accuse justement l’écran.
L’enjeu : vers des écrans mobiles et portables ?
L’ordinateur portable apparaît du même coup comme un support particulièrement adapté :
o pour une consultation solitaire ou collective,
o facilement transportable (par terre, sur une table basse lorsque la table haute est trop haute pour l’enfant)
L’ordinateur portable permet de s’adapter à l’enfant :
o En tenant compte de sa taille, de l’inclinaison variable de l’écran, de sa mobilité particulière dans la maison
o Mais sans le renvoyer à un statut de « bébé » par des effets de couleur ou de rondeur, qui sont des techniques utilisées pour les enfants de moins de 6 ans essentiellement.
D’autre part, l’ordinateur portable offre davantage de fonctionnalités que la console portable, plus petite, uniquement dédiée à un usage ludique.
⇒ L’évolution future peut être un développement de l’ordinateur portable au sein du foyer, dans la mesure où il correspond aussi bien à des attentes des adultes qu’à celle des enfants.
⇒ De ce point de vue, les usages TV restent à développer sur l’ordinateur portable, aujourd’hui largement utilisé pour le DVD, Internet (sites de jeux), les logiciels de dessin, etc.
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