Suite à l’étude réalisée en partenariat avec Havas Entertainment, voici quelques résultats permettrant de prendre la mesure du potentiel des contenus de marques. Il s’agit d’une tribune écrite pour Marketing Magazine.
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En complément, nous vous recommandons la lecture du CB News du 4 février intitulé « Le brand content, l’arme ultime du discours publicitaire ? ».
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Avec le développement accéléré des structures dédiées aux contenus de marques, 2008 sera certainement l’année du Brand Content. Saluons notamment BDDP Unlimited, DDB Entertainment, Betwin, Makheia, Fusion, Arthur Schlovsky (MEC), Imanime, Titanium, Demandez le programme, JWT, Via Alternativa et tous les acteurs de ce secteur en construction.
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Contenu de marque et publicité : alternative ou complément ?
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Le contenu de marque (Brand Content) existe depuis longtemps. Blédina et Pampers ont offert très tôt du contenu autour des bébés. En une décennie Leroy Merlin a créé successivement le programme court « Du côté de chez vous », un mensuel et une chaîne thématique.
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Depuis quelques mois, et l’essor d’Internet, on assiste à une accélération du phénomène, avec des exemples tels que l’affaire Twingo, le lancement par Edf du guide E=moinsdeCO2, la découverte de Londres par les Ypes d’Eurostar ou le jeu Fight for Kisses de Wilkinson.
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L’étude de QualiQuanti en partenariat avec Havas Entertainment sur près de 500 de ces opérations montre l’engouement des consommateurs face aux créations les plus abouties. La bande annonce du jeu Wilkinson et le duel bébé / papa pour conquérir l’attention de maman suscite un bouche à oreille exceptionnel. Les séries de marque, comme l’affaire Twingo, créent une implication jamais vue. Les spectateurs valorisent la capacité des marques à dépasser le discours commercial, et proposer des contenus faisant appel à l’intelligence, avec souvent un regard au second degré sur le produit.
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L’analyse du paysage permet de dégager 2 types principaux : d’un côté les contenus informationnels et pratiques (la collection de livres de bricolage Black et Decker) et de l’autre des contenus divertissants et culturels (mini-séries BMW ou Jeep, sites ludiques)
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Le Brand Content constitue un genre à part entière, complémentaire de la publicité, avec de nouvelles règles. La publicité s’adresse à l’individu en tant qu’acheteur. Le contenu de marque s’adresse à l’individu complet, en tant que parent, citoyen, cinéphile... Avec ses dvd sur le monde vu par les yeux de bébé, Pampers élargit le nombre des « points de contacts psychologiques » dans sa relation à la mère, avec un niveau d’émotion et d’implication beaucoup plus fort.
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La publicité se focalise sur un produit ou la marque, qui ne sont qu’une (très) petite partie de nos vies quotidiennes. Le contenu au contraire rayonne dans un ensemble, se resitue au niveau de l’expérience, et déploie à partir d’un concept un univers complet. D’où l’importance d’un concept fort. Au lieu de parler de ses malles, Louis Vuitton égrène sa philosophie du voyage. La voiture Bmw est resituée dans un récit global, qui la dépasse.
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L’enjeu de la qualité et de l’émergence
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Le premier enjeu consiste à apporter un vrai contenu de qualité. Pour les contenus informatifs et pratiques, délivrer une information crédible, objective, et utile. Dans le cas du divertissement, un contenu réellement drôle, créatif. Avec à la clé des investissements importants.
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Trop de contenus cèdent à la tentation d’une marque trop présente ou mal intégrée qui pollue le contenu. Les réactions de rejet s’expriment sans détour : « je croyais que c’était un vrai contenu, mais ce n’est qu’une pub déguisée ». En proposant du faux contenu, les marques se privent de l’impact publicitaire, sans établir la relation authentique recherchée. Avec des effets parfois nocifs en termes d’images.
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Un autre enjeu consiste à émerger, dans une concurrence de contenus toujours plus forte. Le brand content doit être repéré et susciter rapidement l’intérêt pour que le maximum de consommateurs le consultent. Face à ce nouveau challenge, agences, annonceurs et médias ont à s’organiser pour créer et promouvoir des contenus de marques dignes de ce nom, et finalement faire… de la pub pour les contenus. De belles complémentarités en perspective.
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En complément, voici un article de Laurence Girard diffusé dans Le Monde daté du 24 décembre 2007 qui est tout à fait intéressant.
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Publicité : le client sera roi
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Pour séduire le consommateur, les annonceurs devront désormais s'adresser personnellement à lui, le distraire, le faire interagir. Et le connaître intimement
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Annabelle a décidé de passer un week-end « déconnecté ». L'écran numérique qu'elle porte sur elle n'a pas reçu de sollicitation commerciale ni de messages de son réseau de relations. Mais, dès lundi, la réalité reprendra ses droits. Tout au long de la journée, elle ne cessera d'interagir avec les différents dispositifs numériques, écrans, puces répartis dans son environnement... Car désormais, les marques avec lesquelles elle a décidé de nouer une relation la connaissent personnellement. Son magasin de sport favori, par exemple, vient de lui envoyer un minireportage sur le dernier marathon de Shanghaï. Grâce à lui, elle connaît les temps des vainqueurs, mais aussi les nouveaux modèles de chaussures qu'ils portaient. Elle pourra les tester virtuellement grâce à son avatar en 3D, et passer commande sans même préciser sa pointure.
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Dans combien d'années cette relation intime entre une marque et son client sera-t-elle banalisée ? Peut-être en 2012 ou en 2020. Les entreprises se souviendront alors du moment où les publicitaires ont dû se remettre en question. « Dans dix ans, on se repassera certains films de pub et on se demandera comment les gens étaient assez naïfs pour croire à ces représentations stéréotypées. La pub sera alors en prise directe avec la réalité, elle interviendra à des moments précis de la vie des gens », estime Stéphane Xiberras, coprésident de l'agence BETC Euro RSCG.
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« En termes de marketing, le coup de force et l'intrusion ont disparu. Aujourd'hui, il nous faut obtenir l'autorisation des consommateurs », renchérit Marie-Laure Sauty de Chalon, PDG de l'agence de conseil en médias Aegis Media (Médias, votre public n'est plus dans la salle, Ed. Nouveaux débats publics, 259 p., 18 euros). Une relation renouvelée entre les marques et les clients qui doit beaucoup à Internet.
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Car les internautes, sur le Web, ont entrepris de faire évoluer le rapport de forces. Ils discutent des mérites comparés des produits, partagent leurs expériences, défont des réputations et critiquent les discours marketing. Ils sont, selon Delphine Beergabel, de l'agence DDB, « de plus en plus éduqués, et les marques doivent entrer dans une ère de dialogue ». Certaines, déjà, explorent ces nouvelles pistes de communication et se lancent dans la création de contenus. Ainsi, la marque de rasoirs Wilkinson a lancé, il y a quelques mois, avec l'agence JWT, une campagne baptisée « Fight for kisses ». Au coeur du dispositif : un site Internet accompagné d'un jeu vidéo à télécharger. Celui-ci met en scène un bébé prêt à se battre contre son père, concurrent redoutable après s'être rasé de près, pour obtenir les baisers de sa mère. La chaîne de restauration rapide Burger King est allée un cran plus loin aux Etats-Unis avec son agence Crispin Porter & Bogusky : les clients ont accepté de payer pour obtenir un jeu vidéo conçu par la marque.
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Mais la création de contenus ne se limite pas au jeu. La musique est aussi un filon à exploiter. Comme l'est la production de programmes courts ou d'émissions. Dolce Gusto vient ainsi de donner carte blanche à Jamel Debbouze pour écrire des sketches uniquement diffusés sur Internet. « Il y a une logique de création d'audience. Les marques vont devenir des médias à part entière », commente Philippe Simonet, cofondateur de l'agence Publicis Net.
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Pour nouer ce lien avec le consommateur, les marques cherchent aussi à le faire interagir. Tout récemment, l'agence BETC Euro RSCG a monté une opération pour le site Internet de vente aux enchères eBay. Elle a organisé une vente dont l'enjeu était d'être sélectionné pour tourner un spot télévisé où les heureux élus présenteraient le produit qu'ils souhaitent vendre sur eBay. De même, la marque de produits d'hygiène-beauté Dove, par sa campagne de communication sur le thème de la « beauté réelle » dénonçant les stéréotypes marketing, entretient-elle la proximité avec les consommatrices.
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« Comment se différencier quand les produits se ressemblent ? Ce que l'on souhaite, c'est que la cliente dise : je vais choisir la marque qui est la plus en phase avec moi en tant qu'être humain », explique Sharon McLoad, directrice de la marque Dove au Canada. Elle a lancé un concours pour choisir douze femmes qui coécriront et interpréteront une pièce de théâtre sur le thème de leur relation avec leur corps. L'ensemble, orchestré sur Internet, donnera lieu à un documentaire diffusé sur une chaîne de télévision canadienne.
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Pour être plus proches de leurs clients, les marques souhaiteraient les connaître intimement. Cela viendra. Les sites Internet communautaires comme Facebook ou MySpace, les moteurs de recherche comme Google ou Yahoo, commencent juste à essayer de « cibler » la publicité en fonction des informations que les internautes donnent sur eux-mêmes en dévoilant leurs goûts, leurs achats, leurs projets. Cette nouvelle stratégie débute à peine, mais nul doute qu'elle sera l'une des voies privilégiées dans le futur. Le tout est de convaincre la personne d'accepter ce profilage en lui donnant des contreparties, afin de ne pas provoquer un rejet. Le développement d'Internet sur le téléphone portable, qui n'en est qu'à ses prémices, devrait favoriser cette publicité individualisée. Chacun pourra alors recevoir des messages adaptés et interagir avec les dispositifs électroniques qui seront répartis dans tout l'environnement urbain.
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L'enjeu, pour les marques, est enfin de transformer chaque internaute en « fan », capable de convaincre son réseau de relations d'acheter tel produit ou telle prestation. « L'idée est d'arriver à un cercle vertueux. Les publicitaires doivent créer des contenus qui intéressent les gens afin qu'ils aillent les chercher et qu'ils soient capables d'en être les ambassadeurs », conclut Valérie Accary, présidente de CLM/BBDO. Le consommateur devenant son propre publicitaire, il fallait y penser.
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Laurence Girard
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