Intervention de Laurence Malençon, directrice générale associée de l’agence Rouge lors de l'atelier sur le quali online (SEMO 2008) à propos d'une étude sur les arts de la table et le bien manger.
"L’agence rouge est une agence de communication 360°, développant des médias allant de la publicité, au design, de l’ événementiel au web et aux relations presse/relations publiques.
« Créer des prises de parole pour être dans l’actualité »
Dans le cadre des relations presse/relations publique, nous sommes amenés à faire un certain nombre d’études pour nos clients puisque nous créons des prises de paroles pour être dans l’actualité et que ces études sont souvent relayées par les journalistes qui ont besoin de matière pour étayer leurs articles : c’est dans ce cadre que nous avons commandé un Bulletin Board (BB) sur les arts de la table et le bien manger.
Les études à destination des journalistes sont un peu différentes des études de marché traditionnelles : il est vrai que comme dans toute étude, l’objectif est d’améliorer les connaissances vis-à-vis d’un marché, des usages et attitudes par rapport à un produit, une marque ou un comportement.
Mais dans notre cas, il s’agit ici moins de se fixer sur une marque ou un produit que d’obtenir des perspectives sociologiques et/ou ethnographiques, afin de savoir comment se comportent les français à table.
La deuxième différence est que les journalistes ne vont retenir que les choses qui les intéressent pour nourrir leurs articles : L’étude doit être suffisamment vaste pour fournir des informations multiples : par exemple pour une étude sur le mieux manger, il faut que je puisse donner aux journalistes des informations sur ce que mangent les français, ou leurs manières à table, ou les jeunes et la table, ou le lien entre contenant et contenu ou encore les repas du samedi soir ect… afin d’en tirer un maximum de données.
Nous l’avons appris dans le temps, il faut toujours avoir une partie quantitative : un journaliste va être intéressé par le fait d’avoir une partie fondamentale « expérimentation et impact » ; et des chiffres facilement insérables dans leurs brèves (ex : les jeunes envoient plus de sms au repas que les adultes ?, combien de français sautent des repas par jour ? , quel est le repas le plus fréquemment sauté ? etc.).
Contexte et objectifs de l’étude : L’influence des arts de la table
Le CPDHBJO est le Comité Professionnel du Développement de l’Horlogerie de la Bijouterie de la Joaillerie et des Arts de la Table, un organisme professionnel chargé de la collecte d’informations, de la promotion et la communication des secteurs mentionnés dans son nom.
Nous avons une longue histoire en terme de relation presse et relations publique avec cet organisme, puisque rouge gère les relations presse du secteur des arts de la table depuis 2003 ; nous effectuons un certain nombre d’études pour eux. Au départ, nous avons privilégié les études quantitatives traditionnelles.
Ex : En 2003 a été lancée une étude sur les nouvelles convivialités, qui pour la première fois, avait pour objectif de explorer les rapports entre les français et le fait de recevoir.
En 2004 a été lancée l’étude « kitchen lab » afin de mieux connaitre le rapport entre le contenant (assiette, la matière etc.) et le contenu (ce qu’on mange) et la nature de ce rapport.
Par rapport aux politiques nutritionnelles soutenues par la PPNS (5 fruits et légumes par jour) nous pensions qu’il était fondamental pour une collective de savoir si les arts de la table pouvaient participer à une meilleure alimentation. C’est pour cette raison que nous avons initié cette étude : a priori cette étude est une étude expérimentale, avec une grande partie qualitative : il s’agit d’expériences à consolider par d’autres études pour en étayer les conclusions.
« Il s’agit d’une expérience inédite et qui fut très riche d’enseignements pour nous. »
1) Nous cherchions une étude avec une partie quali et une partie quanti : une partie quanti sur 1005 personnes et quali sur une vingtaine de foyers.
2) Le deuxième point intéressant du BB était d’avoir une étude sur la durée (6 semaines) : il était fondamental d’étudier dans le temps ce que mangeaient et comment mangeaient ces foyers (description des repas, composition des repas, etc.) avant qu’on leur donne les services afin de voir par la suite l’influence de ces nouveaux services par rapport aux habitudes de consommation.
3) Une autre chose déterminante était le fait d’avoir des photos : par rapport à l’alimentation, dans la plupart des foyers il y a une distorsion énorme entre le déclaratif et le réel : on est en France, dans un pays axé sur la convivialité, sur des traditions culinaires fortes. Dans le déclaratif, ces notions ont émergé puissamment (« bien manger » est important pour 84%, « on fait attention », « on saute peu de repas », « manger ensemble est important»…etc.). La place accordée aux arts de la table dans le bien manger était aussi importante puisque « pour 75% des gens interrogés bien manger, c’est dresser une belle table ». La phase qualitative a pu surprendre : on a ainsi vu des tables la plupart du temps très occupées par l’ordinateur, les magazines, la télé, et finalement seulement un petit coin repas au quotidien.
On a ainsi vu au début de l’étude, avant la distribution des services , un décalage entre la réalité et les déclarations : beaucoup de repas pris dans le salon, des assiettes sur les genoux, des enfants en train de grignoter un snack…etc. Les participants ne vous le disent pas dans le BB, mais les photos le révèlent, grâce à l’analyse sémiologique qui permet de saisir les éléments discriminants dans la structure du repas.
« Le Bulletin Board a été une expérience fondamentale par la quantité de matière récoltée »
A cet égard le BB a été une expérience fondamentale par la quantité de matière récoltée sur une période longue : Dans une optique de recherche, c’est important, puisque nous avons validé l’importance des arts de la table sur le mieux manger et que cela nous donne de nouvelles pistes à explorer pour diversifier le discours sur les arts de la table.
Dans une optique journalistique, cela l’est aussi : Nous avons de quoi nourrir des articles sur une quantité d’items : de la consommation media des français quand ils mangent, à l’esthétique des tables lors d’une invitation à dîner un samedi soir, etc.
Cette quantité d’informations sert enfin parce que nos clients représentent une collective, c'est-à-dire toute une série d’acteurs (chaînes, points de vente, marques…), ce qui leur permet de rentrer dans les données du BB pour prendre des informations susceptibles de les intéresser.
Une conscientisation progressive de l’influence des arts de la table sur la façon de se nourrir
On a eu aussi l’impression qu’on se situait, avec ce type d’ étude aux confins entre l’étude proprement dite et de l’expérientiel fort : on a senti que durant les 6 semaines, de liens se nouaient entre les gens, que leur perception a évolué vis-à-vis des arts de la table : c’est important dans notre pays de tradition des arts de la table (le « savoir recevoir a la française ») à rebours d’autres pays tels que l’Espagne où par exemple l’art de la table est plus débridé : on s’est aperçu que l’assiette, le contenant n’existait pas au quotidien pour les gens au début de l’étude: au forceps, nous avons dû tirer des informations relatives au type de vaisselle utilisé, comme si le contenant quotidien était occulté.
A partir du moment où le panel a reçu son service, le modérateur de Qualiquanti a commencé à poser des questions sur l’influence de l’assiette et sur la façon de se tenir à table, il y a eu une prise de conscience progressive par rapport au rôle de la vaisselle dans le repas, pour qu’au final, les participants ressentent une réelle influence des contenant sur la façon de s’alimenter : c’est à une réalité que l’on connaît tous mais dont nous avons pas forcément conscience. Jean-Michel Cohen, le nutritionniste que beaucoup d’entre vous connaissent et qui a préfacé cette étude, faisait remarquer que le contenant a une influence directe sur le sentiment de satiété : Acheter une canette de 25 cl, c’est avoir soif pour 25 cl, acheter une canette de 50cl amène à avoir soif pour 50 cl.
Le fait de le faire dans le temps nous a ainsi permis de voir émerger un vrai niveau de prise de conscience très important pour nous : les gens se sont observés en train de manger, de remplir leurs assiettes, de manier leurs couverts et leurs verres et ils ont commencé à établir des liens entre la proportion des assiettes et l’anti- grignotage dans l’après-midi par exemple, le fait de manger à table et une meilleure digestion ou encore un beau service de table et l’envie d’une nourriture plus élaborée.
Vers un Bulletin Board vidéo…
Au départ, nous avons pu craindre d’être submergé par la matière, notamment par rapport à groupes quali très structurés avec un protocole d’entretien directif et un temps limité. Dans le cadre du BB, la liberté peut être effrayante. Finalement, qu’est-ce que m’enseigne le BB ? On a envie de demander beaucoup de choses et on peut perdre de vue son objectif : on doit alors passer par une analyse approfondie et surtout une importante synthèse de l’institut.
Je pense par rapport à l’usage rp que nous en faisons , on aimerait même pousser le côté contenu et passer au BB vidéo, qui serait intéressant pour faire de véritables reportages et coupler la matière d’étude à la matière expérientielle. Pour nous, cela serait la prochaine étape.
NB : Concernant le bulletin board vidéo, il y a différentes solutions : envoyer des journalistes équipés de caméras (compte tenu des besoins d'images diffusables par les chaînes de TV), demander aux participants de se filmer avec leurs webcams ou avec des caméras vidéo, installer des caméras fixes dans les lieux stratégiques.
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