Lors des JNE (Journée nationale des Etudes) de l’Adetem le 23 janvier 2007, la deuxième partie de l’après-midi était consacrée à la question du recrutement des consommateurs.
- Pierre Ferrer de l’UDA a fait le point sur les principaux griefs vis-à-vis de ce sujet stratégique (professionnalisation des participants, manque de transparence sur les modalités de recrutement) et a évoqué la pression des services achats sur les prix au détriment du poste recrutement.
- La présentation de la Fédération des Terrains Indépendants a permis de constater le manque de considération, que subissait la profession des «recruteurs», à qui on demande toujours plus pour des budgets limités. Cette nouvelle association souhaite dialoguer avec les instituts et instaurer une charte de qualité.
- Yves Krief a présenté ensuite la réponse du Syntec en insistant sur le contre-fichier (fichier alimenté par les membres du Syntec mentionnant les personnes ayant déjà participé à une réunion dans l’année) et en proposant notamment de budgéter à part le poste recrutement (en explicitant les conditions de ce recrutement).
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L’exigence de qualité et de transparence
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On voit bien se dessiner un débat avec d’un côté une demande légitime de qualité dans le recrutement et de l’autre une demande logique d’augmentation budgétaire pour assurer cette qualité. Cet ajustement budgétaire devrait idéalement prendre en compte la difficulté du recrutement : un consommateur lambda est beaucoup plus simple à trouver qu’un profil rare (personne ayant eu une maladie peu courante, spectateurs assidus d’une chaîne thématique avec une faible pénétration, etc). Or, aujourd’hui, le budget varie peu et les recruteurs travaillent dans une enveloppe fermée. En effet, les sociétés de recrutement ont du mal à faire valoir le surcroît de travail d’autant plus que la difficulté du recrutement n’est pas évidente à estimer a priori.
Les sociétés de recrutement utilisent toute une palette de techniques : l’approche directe (rue, annuaires, in situ), l’utilisation de fichiers fournis par le client, les petites annonces. Elles s’appuient surtout sur des bases de données de volontaires constituées par diverses méthodes : recrutement lors de terrains quantitatifs, parrainages, annonces presse ou internet, etc. Ces bases de données qualifiées permettent de trouver rapidement des profils. Ces volontaires sont ensuite contactés majoritairement par téléphone avec une efficacité limitée dès que la pénétration chute. Dans les faits, il est rare que la société de recrutement contacte plus de 500 personnes pour organiser un groupe de 10 personnes. Si les critères de sélection demandés sont pris en compte dans la grille de qualification du recruteur, cela est suffisant, mais s’il faut réinterroger la base, les chances de toucher le cœur de cible sont faibles.
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Le recrutement en deux temps
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Pour réaliser un recrutement de qualité auprès d’une cible pointue, la solution se trouve de mon point de vue du côté des nouvelles technologies. J’ai déjà eu l’occasion d’écrire sur la qualité dans le recrutement des consommateurs. Je voudrais compléter la réflexion en évoquant les méthodes de recrutements utilisées notamment aux Etats-Unis. Voici un extrait d’un message de notre prestataire américain, qui illustre bien la voie du pragmatisme : « What we typically do in recruiting is program an online screening survey with the basic screening questions online, and send email invitations to our queried database inviting them to take the online screening survey. We then telephone those who appear to qualify online to re-confirm their answers, assess articulation and confirm/schedule them for the focus group. We have learned that the 2-step process works very well to insure good, qualified participants.»
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Cette approche confirme la pertinence d’un recrutement en deux temps. Depuis bientôt 6 ans que nous utilisons cette double méthode conjointe du pré-recrutement online et de la sélection téléphonique, il me semble évident que les sociétés de recrutement ou les instituts doivent se doter d’access panels online. Un access panel permet de toucher rapidement la cible visée même si la pénétration est inférieure à 5%. Le travail de sélection téléphonique devient beaucoup plus efficace lorsqu’il porte sur un fichier de volontaires déjà préqualifiés. Grâce à cette méthode, nous obtenons chez QualiQuanti des recrutements de très grande qualité dans des délais très courts. Nous interrogeons via Internet selon les besoins 1000, 2000 ou 3000 personnes pour le questionnaire de screening afin d’obtenir une base de 100 à 300 volontaires correspondant à la cible. La quantité de travail de sélection au téléphone est grosso modo la même, quelque soit la cible.
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La sélection des consommateurs pertinents
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Il y a en France un goût pour le consommateur vierge avec l’idée qu’une personne venue s’exprimer un soir devait retourner en jachère pendant 1 an. Le débat français insiste beaucoup sur les risques et les aspects négatifs (comment éviter les moutons noirs ?) et ne se place pas assez dans une approche constructive (comment mieux recruter des consommateurs adéquats et motivés ?). En effet, le débat sur la professionnalisation des répondants a tendance à occulter le sujet prioritaire, qui est la pertinence des répondants. La réponse que nous avons trouvée face à ce problème consiste à donner la priorité à la qualité intrinsèque des répondants. L’essentiel est de trouver des consommateurs qui sont dans la cible visée, qui connaissent le produit et qui savent pourquoi ils l’achètent. Pour détecter ces profils, il faut pouvoir screener une masse importante puis avoir un dialogue approfondi afin de tester les capacités de la personne et de vérifier si elle est apte à participer. Ce travail prend du temps et ne peut être mené qu’avec un screening de débroussaillage préalable.
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Pour répondre à la nécessité de renouveler les consommateurs, il faut augmenter la taille des bases de données de volontaires. Là encore, Internet constitue un moyen formidable pour générer des inscriptions en masse. Notre panel TestConso.fr, composé de 110.000 inscrits et une moyenne de 5.000 nouveaux inscrits par mois est suffisamment large pour nous permettre d’organiser une centaine de groupes par an. Avec le développement des groupes qualitatifs virtuels (Bulletin Board), nous pouvons faire participer des personnes de toute la France et sortir des 5 ou 6 grandes villes privilégiées pour leur facilité d’accès et leurs salles dédiées.
En proposant une incentive basse (35 ou 40 euros pour 4 heures), on évite les professionnels qui exigent un tarif minimum. Par ailleurs, il est indispensable de disposer de moyens de contrôle propres pour éviter les fameux consommateurs professionnels.
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Le respect des sociétés de recrutement
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Avec l’expérience, on s’aperçoit que le danger est surtout du côté de certains recruteurs complaisants ou négligents, qui travaillent avec un fichier restreint. Certains n’hésitent pas à donner des consignes aux recrutés pour qu’ils se conforment aux critères requis. Les consommateurs finissent par jouer un rôle. D’où l’importance de faire confiance à des entreprises spécialisées ayant pignon sur rue et défendant des critères de qualité. Il faudrait a minima une transparence des méthodes de ces recruteurs.
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Les sociétés de recrutement se plaignent surtout de délais incompatibles avec le niveau de pénétration. Elles souffrent de la pression d’instituts qui exigent l’impossible puis leur reprochent de ne pas avoir réussi leur mission. Elles regrettent l’irréalisme des critères qui leur sont parfois donnés. Par exemple, certains clients idéalisent des cibles et réclament des acheteurs exclusifs de telle marque alors que la population est essentiellement composée d’acheteurs multi-marques. Certains questionnaires de recrutement sont tellement fermés et obtus qu’ils empêchent de bien sentir à qui l’on a affaire. Les sociétés de recrutement militent pour des critères plus vivants, des profils au lieu de définitions théoriques.
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Dans ce contexte, le partenariat entre l’institut et la structure de recrutement est fondamental. Chez QualiQuanti, nous avons une relation étroite avec la société Recrutement Service, pour qui nous avons une très haute considération. Nous dialoguons tout au long du recrutement et ajustons les critères chaque fois que cela est nécessaire. L’équipe de Recrutement Service apprécie beaucoup de travailler sur une base d’individus présélectionnés car elle peut se concentrer sur le cœur de son métier : le dialogue avec les personnes pour les jauger. Nous leur faisons un feedback à l’issue des groupes. Nous jouons aussi la totale transparence avec le commanditaire, qui a accès aux résultats du pré-recrutement et peut ainsi voir le vivier de volontaires dont nous disposons. Cette transparence donne confiance et facilite le dialogue sur les critères. Le commanditaire doit pouvoir suivre la façon dont les consommateurs ont été choisis.
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Le prix de la qualité
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La qualité du recrutement est une clé de succès des études qualitatives. Dans un contexte de pression sur les prix (le prix des réunions de groupes a peu évolué avec des prix de vente qui étaient déjà entre 30.000 et 40.000 francs dans les années 90), le poste recrutement a du mal à obtenir les moyens qu’il mérite.
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Les budgets de recrutement aux Etats-Unis sont plutôt de l’ordre de 100 à 150$ par recruté (avec une part variable en fonction de la pénétration). En comparaison, les budgets de recrutement en France sont plutôt de l’ordre de 50 à 60 euros par participant. Il y a certainement une marge de progression à trouver, surtout pour les recrutements délicats.
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Quant aux incentives, ils se situent aux Etats-Unis entre 100 à 130$ pour un groupe de 3 heures grand public. En France, la règle est de payer entre 10 et 15 euros de l’heure le grand public soit 45 euros les 3 heures. À ce tarif, on ne peut pas dire que nos consommateurs s’enrichissent en participant aux réunions.
Bonjour,
Vous exprimez l'idée, qu'en France, la qualité passe par une incentive faible.
Puis vous constatez le fossé existant avec
l'approche américaine...ne sommes nous pas en totale contradiction ?
Pour ma part, après plus de 10 ans de rerutement quali, panel, fichier, conso et b to b; je suis pour la valaurisation des incentives. Le but n'étant pas d'avoir des participants, venant pour l'argent. Mais tous simplement par respect de l'échange temps et finalité commerciale des annonceurs. En ile de france, une réunion de 3 heures, c'est en moyenne 5 heures à consacré en raison des transports. Si un participant, se déplace pour un sujet lambda,
qui ne soulève aucune passion, je ne trouve pas rassurant qu'il consacre du temps pour une vingtaine d'euros, surtout pour des csp a ou b.....tous comme un artisan plombier,
qui en général, vous demandera, pour une simple intervention chez vous, plus d'une centaine d'euros, le plombier étant à titre d'exemple. Mais imaginez vous invité, pour une réunion ou l'incentive est de 40 euros.
Iriez vous en fonction de vos revenus ? Après une journée de travail bien remplie ?Est ce motivant ? Je ne pense pas, alors certe un csp c, touchant 45 euros pour 3 heures, c'est correct, mais celà limite à une population à faible moyen, souvent concerné par des marques MDD, ne nous leurrons pas.....
Pour ce qui est de l'éfficacité du syntec,
nous savons tous, que les professionnels des réunions, écrivent régulièrement tous les 3 mois, pour ne pas être signalé, comme la CNIL le permet. L'important, c'est la réelle situation professionnelle, familiale, et réellement dans les quotas. Pas le fait que le participant est fait 3 ou 6 réunions dans l'année. Alors, deux réunions dans l'année, pour un totale de 60 à 90 euros...c'est plus celà qui génère la démultiplication du nombre de réunions, que les participants essai de faire. C'est le système qui favorise celà. A titre d'exemple, j'ai été un des premier recruteur, à exiger la carte grise du véhicule. Si le participant posséde une BMW, celà ne le gène en rien dans faire preuve. Et pourtant, quasiment la majorité des cabinets, ne demandent pas cette justification. Pourquoi, tous simplement pour éviter de se trouver face à un groupe de 5 personnes ayant réellement le véhicule recherché, et ne souhaitant pas consacrer un budget recrutement digne de la demande. Question, faut il 5 vrai, ou 8 faux....si la rigueur était appliquée, les pannelistes ne s'inventeraient pas posséder un véhicule dont il ne seront jamais propriétaire. Et sans fichier clients, celà demande des investissements pour les recruteurs. Donc un coût plus important pourles cabinets, et des incentives à la hauteur du niveau sociale...
Anecdote récente, qui malheureusement est très souvent le reflet de la réalité de certains instituts. Une demande de recrutement de cardiologue, pour 50 € ht, avec une incentive de 60 euros pour 2h30.
Seul des non professionnels du recrutement, souvent des panelistes, peuvent accepter celà. Le cabinet bien évidemment ne faisant pas appel à un seul recruteur de ce type...est ce celà l'esprit quali...Et bien évidemment ce genre de groupe, est sanctionné, par un absentéisme des participants.
Pour finir, je recrute à quasiment 90% sans questionnaire. Mais avec un brief, précis sur la cible recherchée. Un recrutement de qualité, c'est un dialogue avec l'éventuel
recruté, afin d'entendre spontanément le recruté, et de pouvoir s'assurer ainsi qui l'est dans les quotas. Recruteur, c'est un métier, alors si il n'y a pas de valeur ajouté, et que l'on se limite à des questionnaires, qui très souvent sont très facilement décodables. Pour une personne souhaitant faire un maximum de réunion. Dans ce cas, effectivement, n'importe qui peux se considérer recruteur.Et que dire, des recrutements des panels en ligne, ou les quotas qualifiants le recruté, sont décrit directement dans l'email proposant la réunion...Pour ce qui est des budgets par groupe, c'est la guerre entre institut, à savoir celui qui aura une présence active en part de marché. Qui favorise les pressions et exigences financières, vers des prix bas.
Pourtant, des petites structures, savent se vendre à des tarifs, bien supérieurs, l'annonceur n'étant pas dupe de la différence de qualité. Ne serait il pas judicieux d'avoir des marges plus conséquentes, qu'une masse de terrains qui ne génèrent que trop souvent des résultats tronqués par un système approximatif. Un recruteur, ne peux démultiplier ses heures.
La qualité des revenus d'un recruteur, se refletera dans l'approche qu'il aura à fournir une qualité de travail, l'inverse n'inspire que le fait de ne pas être respecter, et génère un travail approximatif.
Car certain, n'ont pas les moyens de refuser de travailler à des tarifs dérisoires. Le risque à terme, c'est que les annonceurs se suffisent à eux même, en gérant tous celà en interne. Une tendance déjà bien présente à ce jour.
Voilà ces quelques réflexions, certe, qui ne font qu'éffleurer la situation de nôtre métier tant il y a dire et à faire, pour que le quali retrouve la signification au sens propre de sa première définition.
Cordialement
Christophe HOSE
Rédigé par : Christophe HOSE | 28 septembre 2007 à 15:05