J'ai découvert avec beaucoup d'intérêt en 2004 un texte intitulé "Quanti/Quali = distinction artificielle, fallacieuse et stérile ! ", puis le "testament scientifique" de Jacques Jenny, sociologue retraité de l'Iresco-CNRS.
Cette réflexion décapante a le mérite de montrer l'absurdité de l'opposition quali/quanti, et de remettre le couple question(s)-réponse(s) au coeur des réflexions. Une analyse très stimulante de la part d'un théoricien, à mettre entre les mains de tous les praticiens.
Voici en quelques mots le point de vue de Jacques Jenny, sociologue à la retraite (ancien de l'Iresco-CNRS).
Tous les professionnels savent depuis longtemps -c'est heureux- que les deux grandes méthodes appelées "qualitatif" et "quantitatif" sont complémentaires dans la pratique.
Mais ce qui est moins évident, c'est que le principe même de leur distinction est foncièrement artificiel. Et Jenny se propose de montrer en quoi elle repose au mieux sur une commodité de langage, et au pire sur une illusion d'optique qui peut s'avérer rapidement contre productive si l'on s'avise de la prendre au pied de la lettre.
Certes, d'un côté, on a affaire à des nombres, des suites numériques, et de l'autre à des verbatims et des témoignages. Mais le sociologue va plus loin, en montrant que la compréhension de ces éléments en apparence hétérogènes implique nécessairement des méthodes mixtes qui appartiennent aux deux champs :
- par exemple, on pourra manier des résultats chiffrés tant qu'on voudra, on n'en tirera jamais rien si on ne s'appuie pas sur les discours, les catégories pré-établies, et les ordres de grandeur grâce auxquels ils peuvent prendre un sens. En un mot, il ne suffit pas de calculer pour interpréter.
- la quantité est également présente dans tout corpus de mots, par nécessité grammaticale. Dans toute expression langagière, les dimensions dites quantitatives et qualitatives sont indissociables. Il existe notamment tout un tas de ce que Jenny appelle des "opérateurs de qualification" dont on se sert pour comparer, évaluer, nuancer, pour "compter avec des mots", et qui contribuent au sens.
De manière générale, toute réponse (chiffrée ou verbale) ne peut jamais être comprise indépendamment du contexte qui l'a fait naître. Pour Jenny, l'important est donc de laisser les questions dans leur contexte d'énonciation, et de ne jamais oublier de quelle manière les données ont été collectées.
Cette réflexion très brièvement résumée est très stimulante. Elle invite à repenser d'un oeil neuf certaines pratiques du métier. Je vous invite à approfondir cette réflexion sur le métier en téléchargeant le document ci-dessous :
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