On se pose souvent la question de la fiabilité respective du quali et du quanti.
En général, les entreprises estiment que les études quantitatives sont plus fiables que les études qualitatives, parce qu'elles reposent sur des populations importantes, et fournissent des résultats chiffrés. Avant de faire des investissements lourds, les annonceurs sont plus rassurés si l'étude a été menée sur un effectif élevé. Ils vont donc faire plus confiance aux études quantitatives que qualitatives. Un exemple de résultats contradictoires entre la phase qualitative et la phase quantitative montre que la taille de l'échantillon n'est pas forcément une garantie de fiabilité.
En 2001, l'institut QualiQuanti a étudié en qualitatif un service qui avait reçu un accueil très positif lors d'une étude quantitative. La société qui a commandé l'évaluation qualitative avait des doutes vis-à-vis des résultats très positifs de l'étude quantitative menée par un grand institut international. L'analyse de cet exemple permet de bien saisir le fonctionnement des méthodes.
Le service testé était un abonnement longue durée comprenant un ordinateur familial connecté à Internet, et différents services utiles pour le foyer. L’appareil était un terminal informatique simplifié avec un écran tactile et un petit clavier escamotable destiné à être utilisé plutôt dans la cuisine. Les contenus et services incluaient différentes fonctions, comme l’e-mail, l’agenda, la météo, les recettes, l’actualité locale, etc avec un système d’actualisation automatique pendant la nuit. On proposait ainsi à des foyers pas encore équipés d’ordinateurs et de connexion Internet, l’achat d’un appareil à un prix de départ très accessible avec un abonnement sur un minimum de 24 mois.
Les méthodologies étaient les suivantes :
- Pour l’étude quantitative : interrogation en face à face de 500 personnes avec un questionnaire d’une durée de 40 minutes environ
- Pour l’étude qualitative : 2 réunions de consommateurs de 4 heures avec des internautes et des intentionnistes
Lors de l’étude quantitative, les résultats ont été très positifs.
Ces résultats s’expliquent par les raisons suivantes :
- Tout d’abord l’interviewé était conditionné par une série de questions qui mettaient en évidence son manque et ses besoins.
- Ensuite, l’interviewé était séduit par la présentation d’un ordinateur dernier cri avec un design séduisant et un écran tactile tout à fait fascinant et simple d’utilisation comme le prouvait une démonstration rapide des services.
- Enfin, les services annoncés apparaissaient riches et intéressants à ceux qui n’avaient jamais manipulé Internet.
Cette présentation de l’offre a surtout « bluffé » les néophytes : les interviewés qui se sont déclarés prêts à souscrire à l’offre étaient composés de personnes plutôt de CSP- et sous-équipés en informatique. Les interviewés les moins intéressés par l’offre étaient les personnes CSP+ déjà équipés en informatique et beaucoup moins «impressionnables ».
Lors de l’étude qualitative en réunions de groupe, les résultats ont été très négatifs. Cela s’explique à différents niveaux :
- D’abord, les groupes qualitatifs ont duré 4 heures. Cela a permis d’aller au-delà de l’émerveillement lié à la découverte du produit, et d’entrer dans le détail de son utilisation. La durée de 4 heures a aussi laissé le temps de faire des manipulations et de prendre conscience que le clavier escamotable était délicat à manier et que l’écran tactile était peu adapté aux doigts gras.
- Ensuite, le test qualitatif a démontré que le produit séduisait surtout les consommateurs intentionnistes, tandis que les consommateurs déjà équipés étaient très sceptiques vis-à-vis d’une offre tape à l’œil mais pas concurrentielle.
Une étude doit toujours écouter avec une acuité particulière les objections recevables et les marques de scepticisme surtout si elles émanent de leaders d’opinions, car ce sont eux qui influencent l’entourage.
- Enfin, la dynamique du groupe est plus proche de la réalité, et rend compte du bouche à oreille et des échanges de points de vues inévitables avant ce type d’achat. Si ce projet avait été lancé, les néophytes auraient certainement demandé l’avis de leur entourage éclairé afin de décrypter l’offre. Ils auraient rapidement pris conscience que les fonctionnalités du produit étaient très limitées et que le prix total était très élevé avec un engagement minimum de 24 mois.
Dans cette étude, tout fonctionne comme si l’étude quantitative avait évalué les premières impressions en restant à un niveau superficiel et en évitant d’explorer les freins. L’interrogation individuelle n’a pas pris en compte l’influence de l’entourage. En comparaison, l’étude qualitative fonctionne comme un « torture-test » qui anticipe plus en profondeur la réaction du marché en évaluant le produit après un temps d’échanges et d’expérimentation.
Cet exemple montre que les méthodes qualitatives peuvent être plus perspicaces que les méthodes quantitatives dans la mesure où elles permettent d’aller au-delà des apparences. Dans ce cas de figure, le biais du test quantitatif, qui tenait à la trop grande superficialité de l’évaluation, a été démultiplié sur l’ensemble de l’échantillon. Le nombre d’interviewés n’a donc pas permis de corriger l’erreur de départ. Il n’a fait que l’amplifier.
J'apprécie ce billet complet entre quali et quanti.
La démonstration se passe de commentaire ...
A quand l'époque ou on demandera aux clients de s'exprimer quand ils veulent sur les produits et services d'une marque ? (quali ou quanti ?)
eric dos santos
Rédigé par : Eric Dos Santos | 08 mars 2006 à 20:15
Bonjour,
Je suis en train de faire ma thèse de fin d'étude à ce sujet.
La question que je me pose est alors la suivante : les forums de discussions deviennent-ils les nouvelles méthodes d'étude produit et sensibilité consommateur?
Tel est mon sujet de thèse :)
Rédigé par : Jennfier | 18 octobre 2007 à 15:52