En 2007, dans le cadre d'un appel d'offres, le CNC a sélectionné QualiQuanti pour une étude sur les usages de la vidéo. Vous trouverez ci-dessous la synthèse de ce rapport d'étude et pourrez juger si nous avions vu juste et comment les usages et perceptions ont évolué.
Face au développement des technologies numériques et des offres de services qui leur sont associées, le Centre national de la cinématographie a souhaité mener une étude qualitative sur les nouvelles formes de consommation des images. Elle cherche à évaluer la diversité des comportements de consommation et des modalités de visionnage, la perception des téléspectateurs à l’égard de ces nouvelles offres, la satisfaction des utilisateurs, leurs motivations et leurs attentes. Cette étude essaie de mettre en lumière les nouvelles tendances de consommation. Le CNC a confié la réalisation de cette étude à l’institut QualiQuanti.
La montée en puissance de la technologie
Les nouveaux usages de la vidéo se caractérisent par une multiplication des canaux (TNT, ADSL, VOD, 3G, streaming, téléchargement) et une prolifération des écrans (TV, PC, baladeurs, mobiles). Les consommateurs précurseurs ont pris goût à cette abondance de choix. Le téléviseur conçu autrefois comme un appareil souverain et isolé est de plus en plus connecté en wifi ou par câble à une série d’autres appareils qui décuplent ses capacités : PC, décodeur, box ADSL, disque dur, enregistreur numérique (PVR).
Ils favorisent la prise de contrôle sur la vidéo par le spectateur qui peut facilement commander
(le direct), enregistrer, conserver, transférer des contenus avec une grande liberté. Ces spectateurs veulent être les seuls à décider de ce qu’ils regardent, de quelle manière, à quel moment et à quel rythme. Les capacités de stockage ont fait les progrès les plus saisissants : elles peuvent atteindre plusieurs centaines de Gigas, voire aujourd’hui le Tera, ce qui diminue le besoin de graver sur CD ou DVD.
L’essentiel de l’effort financier consenti par les consommateurs concerne le matériel et les
équipements d’accès à la vidéo, et beaucoup moins les contenus en eux-mêmes.
Une offre gratuite abondante, accessible et de qualité
L’accès à la vidéo gratuite n’a jamais été aussi facile, aussi riche et aussi qualitatif car l’offre
gratuite de contenu a proliféré. L’offre gratuite de la TNT complétée par l’offre ADSL de base
satisfait une bonne partie des attentes. Avec la « télévision de rattrapage » (catch-up TV), le
streaming et le téléchargement, le spectateur est largement comblé. Moins disponible et plus
exigeant, il devient beaucoup plus sélectif vis-à-vis des offres payantes, dont la valeur se
déprécie à ses yeux. Il est prêt à payer pour une télévision à la carte (chaînes à l’unité, minibouquets, VOD) mais réticent aux bouquets larges et engageant dans la durée. Les spectateurs se dessinent une télévision personnalisée et à moindre coût, qui semble aujourd’hui les satisfaire totalement.
L’explosion des sites de partage de vidéos
La fréquentation des sites de partage de vidéos s’est rapidement inscrite dans les habitudes
des internautes qui s’y rendent très régulièrement voire quotidiennement. Ces sites complètent
l’offre gratuite en donnant accès à des contenus très diversifiés, facilement et sans attendre.
La moindre qualité du streaming est tolérée du fait de la gratuité et de l’immédiateté. Le
visionnage de contenus illégaux en streaming est assimilé par les consommateurs à de la
« piraterie douce ». L’internaute regarde des contenus piratés sans effort, sans culpabilité et
souvent sans conscience d’être hors la loi dans la mesure où il ne télécharge pas le contenu
mais le consulte directement. Les nouvelles formes de consommation des images : TNT, TVIP, VOD, sites de partage, piraterie etc.
Le streaming illégal : une piraterie « douce »
>La banalisation du mode de visionnage en streaming encourage l’émergence d’une nouvelle
forme de piraterie « douce » et lève les derniers freins à la piraterie. L’accès gratuit, immédiat
et sans manipulation déculpabilise l’internaute qui n’oserait pas télécharger. Le streaming est
perçu comme une activité sans aucun risque, compte tenu du mode de consultation. Avec le
streaming, la piraterie finit par s’inscrire comme une pratique normale, courante, dont l’idée
même qu’elle puisse être illicite disparaît parfois presque totalement de l’esprit du spectateur.
Durcissement et banalisation de la piraterie
Il y a encore trois ans, la piraterie d’un contenu audiovisuel sur Internet était un acte
relativement fastidieux, souvent lourd techniquement, et encore teinté d’une connotation
transgressive. Il est aujourd’hui largement libéré, facile, rapide, accessible à tous et encore
moins marqué par l’illégalité.
La piraterie audiovisuelle s’est fortement accentuée avec la montée des débits et la
sophistication des outils de stockage et de transfert. La « massification » et la banalisation des
pratiques s’accompagnent d’une tendance à privilégier l’investissement dans les moyens
d’accès et le matériel plutôt que dans les contenus. Les pirates ne se sentent que peu ou pas
coupables et n’ont pas conscience des risques qu’ils font encourir à l’économie de
l’audiovisuel. Ils attendent que les professionnels trouvent de nouveaux modèles
économiques, certains d’être dans le bon droit de l’évolution historique.
Inéluctablement, le développement des disques durs et écrans nomades encourage la
piraterie. Avec l’augmentation des capacités, la piraterie change d’échelle. Les utilisateurs ne
s’échangent plus simplement un film ou une série mais se transmettent désormais une saison
complète voire une bibliothèque virtuelle de plusieurs dizaines de films avec une très grande
facilité.
La VOD : un service novateur au potentiel important
Aujourd’hui, la VOD est une activité qui suscite un intérêt fort voire un certain enthousiasme de
la part de ceux qui l’ont testée. L’engouement et les attitudes favorables à l’égard de la VOD
sont d’une certaine manière comparables à ceux suscités par le DVD à sa sortie.
La VOD a un rôle à prendre très important dans ce contexte de liberté de choix. Elle permet
d’accéder à une offre premium à tout moment, sans engagement et sans effort. Elle remplace
avantageusement la location vidéo mais aussi l’achat de DVD et l’abonnement à des chaînes
payantes. Elle apparaît aussi comme un remède acceptable à l’effort éventuel de
téléchargement, rempart potentiel contre la piraterie. Pour ceux qui l’ont testée, la VOD suscite
un engouement par le confort et le choix qu’elle permet. Elle est vécue comme un moyen
innovant d’accès à la vidéo et apporte une liberté inégalée. Reste à accompagner la
maturation et le développement des habitudes de consommation avec l’amélioration
progressive des catalogues et la mise au point d’offres fidélisantes.