Intervenants :
- Nathalie Rastoin, Directrice Générale, Ogilvy France
- Jean-Robert Bellanger, Digital Marketing Manager, Red Bull France
- Nicolas Levant, Responsable Publicité Retail Monde, BNP Paribas
Intervention de Natalie Rastoin :
QUOI ?
Le Brand Content pourrait-il être un moyen de réconcilier les français avec la pub ?
Il permet à une marque de faire vivre sa culture à travers un contenu propre.
Mercedes Erra évoquait le désenchantement face à la pub, expression d’une triple crise :
- la publicité aujourd’hui n’est plus jugée ni divertissante ni informative,
- il y a plus de publiphobes déclarés que de publivores,
- la mutation des médias brouille les pistes.
Dans ce contexte, le Brand Content peut être une réponse :
- moins formaté que la publicité classique
- substitution à un marketing de l’interruption d’un marketing de l’attention
- un format multicanal, qui s’adapte aux nouveaux canaux
Avec l’abaissement des barrières à l’accès d’internet, plus de simplicité et de facilité pour diffuser de nouveaux formats : vidéo, web séries, docu, jeux…
Exemple ancien du guide Michelin qui a introduit le brand content dès 1900 : alors seulement 2400 automobiliste en France, et l’acte d’acheter des pneus était très impliquant. Distribution aux clients d’un guide plein de contenu (garages, hôtels, notaires…) devenu payant en 1920, puis renouveau avec la création des étoiles en 1928, qui incarne la naissance du grand concept de la recommandation que l’on trouve aujourd’hui sur Tripadvisor par exemple.
ð Double objectif :
- Produire un contenu passionnant qui soit relayé spontanément…
- … mais dont seule la marque puisse être l’inspirateur
COMMENT ?
DO |
DON’T |
- S’assurer que le brand content s’inscrit dans une stratégie, et non dans une mode - S’adresser au spectateur, à l’individu, plutôt qu’au consommateur
- Accepter le principe de la conversation : pas d’imposition de marque, on réagit en temps réel dans une logique de construction à long terme
- Décliner une culture de marque sur une multiplicité de supports pour gagner en puissance
- La qualité de la production (journalistique, éditoriale…) est aussi importante que l’idée
|
- Etre obnubilé par le branding en oubliant la culture : ce n’est pas une logique d’attribution
- Penser le brand content comme un One shot sur le court-terme : en plus d’être inefficace, cela peut être contreproductif (internet n’oublie rien)
- Imaginer que le earned medias s’obtient sans soutien (paid media, e-influence…) : rien ne s’obtient sans un amorçage |
Ø IBM – Le Monde
Contenu partagés très journalistique.
Ø Vuitton
Volonté d‘aller plus loin encore dans le contenu : stratégie qui dépasse le voyage, on passe de l’idée de destination à l’idée de destinée.
- Le voyage est véritablement la vie d’un certains nombres de gens : Keith Richards, Mikhaïl Gorbatchev...
- Journey to the Moon (2009) : célébration des 40 ans de l’alunissage d’Apollo 11.
Intervention de Jean-Robert Bellanger de Red Bull
Une politique de brand content très organisée qui donne lieu à une masse critique de contenus obtenue par la démultiplication des niches, liées entre elle par une cohérence d’ensemble, et sur le long terme.
Il s’agit d’actionner simultanément différents leviers marketing et de communication afin de faire parler de la marque. La canette reste au centre (on vend avant tout une boisson énergisante) mais pas seulement, le business évolue.
1. Digital media
- Redbull.fr : pas un site de marque, on parle très peu de produit, c’est surtout un site media (photos exclusives, interviews, jeux concours, vidéos…)
- Social media : Red Bull a l’une des premières pages de marque sur facebook avec 22 millions de fans, idem sur twitter…
- Red Bull TV : web tv qui stream du contenu 24h/24 avec 7h de contenu frais par semaine
2. Apps et jeux vidéo, dont 90% sont gratuits :
- Red Bull Academy radio (sorte de deezer)
- Jeux sur PS3, X-box (comme Formula Face)… qui ne sont pas de l’achat publicitaire : on retrouve l’univers de la marque, il s’agit d’aller plus loin dans le jeu.
3. Red Bull Media House : organe central de production de contenu dans les 164 pays de présence de la marque, concentré dans cette grosse boite de plus de 300 personnes, en Autriche, et qui s’occupe de la mise aux normes puis de la mise à disposition gracieuse des contenus pour les media.
- Commercialisation de formats longs comme film « Art of flight » produit avec Quicksilver, téléchargeable et payant (env. 8€) sur Apple store et bientôt sur Amazon et en DVD dans les boutiques Quicksilver…
- Partenariat avec Direct star sur laquelle Extreme star, 52’ hebdo le samedi et le dimanche : pas une rubrique fourre-tout, exigence d’impact et vraie ligne éditoriale.
- Chaîne Red Bull TV
4. Red Bull Mobile (pas en France)
5. Culture
Red Bull n’est pas sponsor mais véritablement producteur, créateur et logisticien des évènements, qui concernent une multitude de niches.
- World Tour : création de 10 groupes furtifs pour le festival Jazz à la Villette pour faire une date unique, dans 10 pays
- Red Bull Beat it : danse de rue itinérante le soir de la fête de la musique
- Red Bull BC One
- Red Bull Break dance
- Red Bull Academy = workshop de musiciens
- Red Bull studio : studio mis à disposition pour les jeunes artistes à Londres, en Allemagne, en Afrique du sud…
- 12mail : galerie d’art rue du mail
6. Sport
Partie émergée de l’iceberg. Il s ‘agit d’accompagner les athlètes et les events sur une longue durée. Plus de 100 évènements et autant de contenu affilié dans le monde. 6000 personnes dans le monde bossent dessus en interne.
- Sponsor d’athlètes (650 à 700) : Antoine Montant, champion du monde de F1…
- Red Bull Cliff diving, la Rochelle
- Red Bull King of the rocks : compétition internationale avec des étapes de qualification organisée en France
- Red Bull Linecatcher
- Red Bull Balle aux prisonniers : compétition dans les facs…
7. Red Bulletin
Magazine gratuit encarté dans les quotidiens (Sunday Telegraph en Angleterre…) avec près de 5M d’exemplaire dans le monde, une appli Ipad gratuite dans 10 pays (beaucoup de vidéos…)
Les points forts :
- La conception se fait majoritairement en interne : Red Bull travaille avec des agences très précises et pointues plutôt pour la logistique, des sociétés de prestation, des free-lances… mais pas d’agence globale.
- Budget très largement réalloué dans le marketing et la communication (la société n’est pas cotée en bourse, pas de dividendes à reverser)
- Sélection des domaines pays par pays : en France la culture marche très bien, culture des 2 roues, des sports mécaniques aussi…
Monitoring de l’efficacité d’une telle politique ? La satisfaction des personnes que l’on touche sur différentes niches, la reconnaissance du milieu, et pas seulement la valorisation d’outcome media qu’il est très difficile de chiffrer (nombres de blogs…). Il s’agit plutôt de savoir ce qui va se dire que chaque event sur les réseaux sociaux notamment.
ð Résultats à l’échelle locale : le marché français est dans le top 6 en 3 ans (lancement produit en avril 2008)
Intervention de Nicolas Levant de BNP Paribas sur les colocs
Prix Brand Content 2011
Pourquoi ?
Le brand content chez nous n’est pas un effet de mode, bien plus rationnel : on n’avait pas Keith Richards, on avait Eric et Ramzy à qui on faisait décliner des messages pub très traditionnels et qui marchaient. Au bout de 3 ans, remise en question pour apporter de l’innovation sur un public en perpétuel renouveau : les jeunes. Cette cible est toujours novice par rapport à la marque bancaire, et globalement réfractaire et peu en affinité.
Comment ?
Besoin de nouveaux modes de conversation. Dans les années 80, on allait chercher les jeunes dans les centres commerciaux le samedi, aujourd’hui on va sur internet. Qu’est-ce qu’on se dit, comment on se parle ? BNP adopte une posture assez humble : on a des offres et services qui les intéressent mais ils ne veulent pas l’entendre. Ce qui est difficile c’est d’aller leur parler : comment émerger, créer de l’intérêt pour le transformer en préférence de marque, tout en restant fidèles à ses fondamentaux, ses valeurs (bienveillance, humour) et ses codes (cinéma et tennis principalement).
Exigences :
- l’exécution est en effet primordiale vs la pub traditionnelle : il fait trouver les bons interlocuteurs, les bonnes personnalités (réalisateur, sportif, auteur de BD…) avec qui propager le contenu.
- le phasing est très important : contrôle de l’achat d’espace essentiel. Pour les Colocs, décision de sortir en marque blanche pendant les 2 premiers mois : le contenu c’est le contenu, la BNP y prend sa place avec humilité pour revenir sur son métier n°1 en l’utilisant à bon escient pour pousser ses offres. Puis activation : au départ pas d’achat d’espace mais community management, relations presse… puis convertion en pub plus traditionnelle.
Les Colocs
- Objectif : comment intéresser les moins intéressés en se démarquant de la concurrence et sans tomber dans la caricature (on se trompe souvent quand on force le « jeunisme ») ?
- Idée : le logement des jeunes est une préoccupation majeure, un insight évident. Or la BNP a des offres. Choix du vecteur particulier de la colocation qui est un phénomène de société et un terreau narratif extraordinaire.
- Exécution : choix de partis pris forts avec Riad Sattouf (auteur BD et ciné). Production d’une mini série. Pas forcément cher, moins en tout cas qu’une campagne de pub classique: on produit modestement des petits films puis on les propage partout. C’est surtout beaucoup plus de boulot.
- Démultiplication des points de contacts via une une diffusion 360° : print qui réutilise les personnages de la série comme porte-parole, ouverture d’un espace de rencontrer physique, chaînes TV qui broadcast la série…
- Résultats :
ð Un impact important sur la force de vente (très mobilisée sur la période de rentrée étudiante, on leur fournit un premier argument commercial, motivation décuplé)
ð Des items de courage et d’originalité attribués à la marque
ð 11 millions de vues, +1,6 % de hausse sur les ouvertures de compte
- La suite ? Il faut rester dans l’innovation. Des attentes ont été créées par BNP, on se doit d’y répondre. Saison 2, avec sans doute un retour à des médias plus traditionnels et impactant, par exemple en coproduction avec des chaines de tv ou longs-métrages.
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