Ces
contenus étaient le plus souvent des primes associées à l’achat du produit
destinées à fidéliser les acheteurs. Ils avaient le mérite d’apporter un supplément d’âme aux produits, de constituer une petite attention généreuse.
Les
cartes-réclame
La période
comprise entre 1860 et 1914 est caractérisée par deux facteurs qui vont profondément
bouleverser la production des images populaires.
- Le premier réside dans une évolution importante des techniques de l’estampe, dont l’exemple le plus abouti est la chromolithographie.
- Le second est d’ordre sociologique : le développement du capitalisme industriel provoque l’émergence d’un marché sur lequel sont proposés de nouveaux produits et qui s’appuie sur des modes de distributions inédits, tels ceux tournés vers les grands magasins.
Toutes ces «nouveautés» vont déterminer un âge d’or de la réclame et
l’apparition de "cartes-réclame" (vignettes imprimées sur carton, éditées
en séries, et offertes massivement aux acheteurs). Pour la plupart de la taille
d'une carte de visite, elles naissent autour des années 1870 en Europe, et
connaissent un énorme succès jusqu'à la veille de la 2ème guerre mondiale.
Inventées par les nouveaux industriels qui avaient compris l'importance de la
publicité, elles popularisent considérablement des produits nouveaux ou de luxe
tels que le chocolat, le sucre, l'extrait de viande (ex. Liebig), ou des concepts de vente révolutionnaires, tels que les
grands magasins (ex. le Bon Marché). Pour promouvoir son magasin,
Aristide Boucicaut, directeur du « Bon marché » imagine d’offrir une image
historiée à chaque achat afin de conquérir sa clientèle : des séries à thème de
6 chromos fidélisent les mamans harcelées par leurs rejetons collectionneurs en
herbe. Les enfants entreprennent alors de les collectionner et leur engouement
est prodigieux.
Les « chromos »,
des images esthétiques et pédagogiques à collectionner
Beaucoup d'images sont imprimées vierges de toute publicité, puis surimprimées à la
demande du client, en général de petits commerçants ne pouvant se permettre de
faire faire des modèles exclusifs comme les grands magasins. Il n'est donc pas
rare de trouver la même image "faisant la réclame" pour des établissements différents.
A l'heure actuelle, les
chromolithographies publicitaires anciennes font l'objet de collection. Bien
qu'imprimées à très grand tirage, elles sont maintenant de la plus grande rareté.
Dans la lignée des distributeurs, les marques alimentaires (Liebig, Poulain, Suchard, Lu) ont pris l’habitude d’offrir
à leurs clients des images à collectionner. Ayant pour cible les petits écoliers, les
chocolatiers lancent sur l’initiative d’Albert Poulain dans les boites de cacao les « chromos » sur le marché. Ces supports
abordent tous les sujets : histoire, géographie, sciences naturelles, littérature,
monde du cirque, automobiles… certaines proposant devinettes, charades ou rébus
avec toujours
L’histoire de la
communication de Poulain
L’article de Jean
Watin-Audouard sur la marque Poulain (article disponible en intégralité chez Prodimarques) montre
combien la marque Poulain a été innovante dans le domaine des contenus.
Albert Poulain invente en 1884 le " petit-déjeuner à la crème vanillée ". Dans le paquet, une " surprise " destinée à fidéliser les enfants : des petits soldats en tôle lithographiée fabriqués dans l'usine à raison de dix
nouveaux sujets, tous les mois ! " L'opération ne durera qu'un an, en
raison de son coût trop élevé. Les petits soldats seront remplacés par des
petits livrets de contes ", précise Nina Favart.
L'usine accueille également une imprimerie d'où sortent les séries d'images à
collectionner. Les chromos publicitaires sont un véritable miroir de la société
et de ses temps forts. Les scènes de la vie quotidienne, appelées " scènes
de genre " prédominent entre 1880 et 1890, où l'on voit des enfants costumés
jouant des rôles d'adultes. Après l'Exposition Universelle de 1889, les thèmes
illustrent l'ouverture sur le monde comme la série " Les Sciences "
en 1895 ou "le voyage du président Félix Faure en Russie " (1897). Et
quand la société Poulain entend accompagner la scolarisation des enfants (les
lois sur l'enseignement primaire gratuit ont été promulguées en 1881) avec des
images " instructives " (Le Tour du Monde en 80 jours, le progrès,
les insectes, les ponts pittoresques , etc.). 350 000 chromos par jour, soit
127 750000 images par an pour la seule année 1900 !
Ainsi des " musées scolaires ", ancêtres des kit pédagogiques, introduits à l'école en 1906 : des boîtes contenant tous les ingrédients qui entrent dans la composition du chocolat servaient à l'instituteur pour une " leçon de choses ".
Ce dernier
pouvait en 1909 s'aider d'une affiche ou tableau mural Poulain pour expliquer
la cueillette du chocolat et sa fabrication. Et les élèves protégeaient leur
cahier avec des protèges-cahiers… Poulain.
Autre outil de
promotion dont l'utilisation témoigne, pour l'époque d'une audace certaine de
la part de Georges Bénard : le cinéma. Des " billets de faveur ",
distribués dans les tablettes de Chocolat Poulain Orange donnaient droit à une
entrée à moitié prix. Avec l'acquisition du premier cinéma en 1907 à Marseille,
la société Poulain devient, comme Pathé, un propagandiste du 7ème art ! En
1914, la société comptera 110 salles de cinéma dont un certain nombre dans les
pays où elle exporte, comme l'Egypte ou l'Angleterre où l'on peut lire sur les
emballages Poulain "Taste and compare" ou "Taste and be convinced".
Après la Seconde Guerre mondiale, la famille Bénard continue d'innover sur le plan commercial. Partenaire du Tour de France pendant 35 ans pour lequel il est à l'origine de la caravane, Poulain crée aussi le grand prix de la montagne (cf porte-clé de l'époque)
La
diversité des contenus
En allant sur des sites comme Ebay, on découvre des objets étonnants proposés par des
marques. Ainsi Banania a développé le Cinébana à fabriquer soi-même à partir d’une
boîte de Banania et d’une lampe de poche. Ce projecteur de confection permettait de projeter des images. Il s'agit d'un projecteur en carton qui fonctionnait avec une lampe de poche. Cinébana, que l'on obtenait contre 16 points Banania et 7 timbres poste pour lettre dans les années 46, proposait différentes histoires en 20 images chacune.
On y trouve aussi quantité de livres ou de disques édités par des marques tels que "Le Chocolat Menier T'invite A Un Voyage Au Pays Des Grands Fauves" avec Claude Darget.
Sur Planete Musée Chocolat, des vitrines recèlent une gamme d’objets publicitaires : éventail Meunier (1931), cendriers, boîte à musique, porte-clés…
Banania, Menier, Poulain, La Marquise de Sévigné, entre autres sont des
marques qui ont permis au musée de glaner des pièces de collection comme des
chromos, des buvards, des boîtes, des affiches, des coffrets pédagogiques, des
jouets
Lors de la première grande manifestation tournée vers le commerce et l'industrie, selon
Ces exemples de
contenus développés par les marques empruntent surtout au registre de la découverte,
de la pédagogie, du culturel, et de l’informatif. On ne peut qu’être que touché
par la poésie mêlée à une certaine naïveté qui se dégage de ces créations artisanales.
La création de contenus était autrefois surtout tournée vers les enfants
(contes, images, jouets) et apparaissait d’autant moins mercantiles et d’autant
plus sympathique et spontanée. Ces contenus étaient destinés à être collectionnés
et non simplement consommés. Ces objets avaient le privilège de la rareté alors
qu’actuellement nous sommes dans la surabondance. Ils s'inscrivaient dans la culture populaire et produisaient du lien social en accompagnant la scolarisation progressive de la société.
Les marques
ont profité des dernières techniques d’impression et de fabrication pour en
gratifier les consommateurs. Ces
contenus associés directement aux produits et à leur emballage incitant à la
collection avaient vocation à créer une relation dans la durée. La promotion des ventes d'aujourd'hui s'inscrit dans cette logique de cadeaux en utilisant surtout des licences. Si on
transposait aujourd’hui ce type de démarche, quels seraient les contenus les plus
logiques. Comment retrouver cette rareté ou ce caractère exceptionnel ?
Comment intéresser les plus jeunes à des contenus offerts par les marques ?
Comment renouer avec cette dimension expérimentale et cette volonté de nous faire découvrir le monde ? Comment associer les
artistes de notre époque à cette production ? Quels sont les domaines sous-exploités par les médias que les marques pourraient nous faire partager ?
Voici quelques exemples issus principalement de collectionneurs :
http://pagesperso-orange.fr/pone.lateb/cotation6.htm
http://caille-des-bles.blog.fr/2007/03/11/chromographie_chocolat_suchard~2683790/
http://bibliographie.jeudego.org/chromos_images_photographies_jeu_de_go.php
http://www.bookinerie.com/pages/goodrech.php3?titres=coll%E9es&Tri=Jour&Ordre=DESC
http://loopy.vefblog.net/loopy/cat9/1.html
http://user.online.be/~online603230/data/li/li7.html
http://www.kaskapointe.fr/pages/Chromos_Stollwerk.htm
http://pagesperso-orange.fr/mej/html/cosmar/hollande.htm
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