Impossible de se contenter d'afficher une référence pour la vendre. Le commerce, et en particulier le e-commerce, n'échappe pas aux contenus. La fonction informative fait partie des fonctions primaires de la vente, celles qui doivent mettre le spectateur en situation d’achat : on part d’un produit en particulier, et on l’explicite pour en détailler les fonctionnalités. L'éditorialisation peut aller beaucoup plus loin avec la transmission d'expertises facilitant et favorisant l'achat.
La culture produit
Une démarche consiste à partir d'un univers (les aspirateurs, les foies gras, l'habitat écologique) en laissant le lecteur déduire le produit particulier qui lui convient. Au lieu de mettre en avant directement l'objet sélectionné et proposé à la vente, on peut expliquer la catégorie en général, les tendances de consommation en intéressant le public à un univers. L'ancienne émission de TF1 "A vrai dire" excellait par sa capacité à baliser une catégorie de produits en 4 minutes. Appelons "culture produit" cette démarche de connaissance et de compréhension. La culture produit n’est pas seulement un argument « moral », une « excuse » pour se montrer incisif sur la vente. Elle est aussi un outil rhétorique à exploiter. En effet, l’apport d’une séquence de culture produit permet de structurer la vente autour d’un axe clair, elle donne une grille de lecture qui prépare et facilite le processus d’achat. Pour donner envie de s'équiper de nouveaux matériels, il faut expliquer au lecteur les conditions d'un habitat plus économique comme le fait Leroy-Merlin avec "Bien au chaud dans ses économies". Avec le web et la vidéo, les sites de vente en ligne peuvent apporter beaucoup sur le terrain de la relation pragmatique aux produits. Un site comme Pixmania a développé une collection de guides d'achat extrêmement riches qui compensent l'absence de vendeurs. Téléshopping propose une rubrique trucs et astuces qui anime son catalogue (cf exemple yaourt).
La prescription éditoriale
Dotés depuis longtemps d'une capacité de recommandation, les journaux et magazine web peuvent exploiter la possibilité offerte par Internet de relier leur capacité de prescription aux ventes. Be.com a choisi d'éditorialiser le contenu de sa boutique en ligne avec ses blogueuses. Dans feu le magazine Tips, beaucoup des articles concernaient des objets vendus en ligne. Patrick Robin de 24h00 a poussé la logique du média marchand à son maximum avec une association étroite entre informations et vente, sur le web comme sur le papier (cf son magazine gratuit diffusé depuis quelques mois) : 24h00.fr est le premier portail entièrement dédié aux e-shoppeuses :
des invitations, des bons plans, des promotions, des privilèges, des
réductions chez de nombreux partenaires, des infos sur la mode et le shopping en ligne...
L'éditorial, véhicule vers la vente
On voit aussi un mouvement inverse où l'éditorial se rapproche de l'e-commerce. Pour rentabiliser le contenu par autre chose que de la publicité, il suffit de faire du contenu un véhicule vers l'achat. Lorsque le Figaro.fr traite d'une pièce de théâtre, celle-ci est proposée à la vente via TicketClic. Si le site traite d'un match de rugby France-Angleterre, Vodeo (propriété du Figaro) proposera à côté de l'article de visionner un documentaire payant sur la légendaire rivalité entre nos deux pays. Autre modèle, NextradioTV (BFM, RMC, La Tribune) propose des emplacements à des sites marchands avec une rémunération liée au trafic généré.
L'éditorialisation communautaire : les avis de consommateurs
Un puissant levier d'éditorialisation consiste à susciter des avis d'acheteurs, qui dopent les ventes comme l'a très bien montré un article du Jdnet. L'exploitation industrielle et systématique du bouche à oreille (Retour d'Opinions) est un moyen économique et efficace pour motiver l'e-acheteur. Même si certains retours d'expériences sont négatifs, ils permettent à l'internaute d'anticiper ses futures réactions et de se décider.
Dans l’information traditionnelle, un jugement émane toujours d’un individu, qui s’engage, donne son avis. Le Retour d’Opinions est un jugement collectif, qui fonctionne comme un « portrait reflet », comme une « émanation spontanée » de l’opinion. Ces opinions sont composées de verbatims qui gardent la trace des évaluateurs. L’élaboration collective du jugement fait que les lecteurs s’y retrouvent en miroir et peuvent confronter, mais aussi conforter leur opinion. Dans la société, les individus sont atomisés, à la recherche d’un consensus avec les autres. Face à cet isolement, les avis aident à se forger son opinion par allers-retours successifs.Sur ce sujet, je vous invite à lire ci-dessous un extrait d'un article de Satellinet sur "les médias en ligne à l'heure du e-commerce" :
Les sites grand public de vente en ligne sont toujours plus nombreux à opter pour l’éditorialisation communautaire de leurs contenus, notamment sur le segment des biens culturels. « Les produits culturels en général sont des biens d’expérience : la valeur perçue par l’utilisateur n’est connue qu’après consommation de ce bien. À ce titre, il est absolument essentiel d’éditorialiser le contenu offert pour assurer l’adéquation entre l’offre et la demande. Cette adéquation est synonyme de satisfaction client, donc de récurrence d’usage », estime Pierre Fremaux, cofondateur de Babelio, un réseau social dédié aux livres et aux lecteurs. Editorialiser l'offre permet, par conséquent, d'aider le client à se repérer dans l'abondance de l'offre. « L'éditorialisation professionnelle (comme la critique de presse, les prix littéraires ou les disques d'or) bien que très utile, perd sa dimension incontournable. Elle n'est plus capable de couvrir l'ensemble du catalogue (Télérama, par exemple, ne pourra faire qu'une petite sélection de livres ou de disques à critiquer) ou de personnaliser l'éditorialisation (le site du NouvelObs, par exemple, ne connaît pas les goûts culturels d'un visiteur donné). » C'est en ce sens que les réseaux sociaux peuvent éditorialiser avec pertinence des catalogues de plusieurs centaines de milliers de références. Grâce à un modèle économique axé sur deux
points, la monétisation de la connaissance client et de l'éditorialisation, à travers des web services de recommandation de lecture, d'une part, et la monétisation de la relation avec les éditeurs de livres, d'autre part, la jeune pousse Babelio a atteint la rentabilité. « Les éditeurs cherchent à cibler des influenceurs pour promouvoir des titres à venir ou sortis, précise Pierre Fremaux. Babelio leur propose notamment d'identifier, dans notre base de bientôt 12 000 membres, les lecteurs influents et de leur proposer un livre en échange d'une critique. C'est l'équivalent d'un service de presse et de marketing sur internet avec des taux de contribution proches de 100 %. »
Voir également l'analyse sémiologique que nous avions faite en 2004 sur les avis de spectateurs de films via internet.
Excellent article !
J'invite également tous les sites et annonceurs à la recherche de contenus éditoriaux vidéos à venir parcourir notre catalogue Plazzle ou à me contacter pour parler de vos projets
Rédigé par : David Couturier | 15 avril 2010 à 14:52